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Tous les stagiaires.
La tradition équestre que perpétue le Maroc a favorisé le développement d’activités artisanales liées aux chevaux et aux cavaliers.
La sellerie artisanale en est la plus belle et prestigieuse illustration. Elle consiste à la réalisation de tous les éléments composants l'harnachement du cheval.
Le maître artisan sellier confectionne, en effet, l'harnais du cheval, constitué d'une selle à arçon de bois d'olivier ou de cèdre, recouvert d'une peau de chèvre rétrécie au séchage ou bien une peau d’ovin. Le pommeau et le troussequin sont particulièrement hauts afin de maintenir l'assise du cavalier. L'ensemble est recouvert d'une chemise de selle en cuir brodé d'or et d'argent. Pour protéger le dos du cheval, la selle repose sur six à dix tapis en laine bouillie de couleurs différentes. Les étriers en fer sont maintenus par de courtes étrivières. L’encolure, la couronne, la têtière et la cravate, autrefois brodés de soie multicolore, sont aujourd'hui richement ornés au fil d'or. Le mors en acier et à canon droit, rattaché à une gourmette, est particulièrement dur, et permet de stopper le cheval en quelques mètres.
La selle est connue comme étant le voyageur placé sur le dos du cheval et qui sert à siéger le passager.
Une selle artisanale est composée, en principe, de six pièces et d’environ trente-six sous-pièces, avec des dessins brodés sur chaque pièce.
Les grandes catégories de selles artisanales sont :
La forme de la selle est induite par une armature rigide en bois, appelée arçon. Autour de cette armature sont agencées différentes pièces :
A ces pièces, s’ajoutent d’autres accessoires, tels que le Poitrail et la Sangle.
La fabrication des selles artisanales associent divers métiers et branches d’activités, tels que la borderie, le brocard, le feutrage, le tissage, le bois, la ferronnerie, le cuivre, la damasquinerie …
A titre d’illustration, un maître sellier faisait travailler et avait à sa disposition 80 à 100 brodeurs.
Quand au facteur temps, une selle artisanale de qualité peut prendre en moyenne plus de vingt jours de travail.
Les selles artisanales ainsi que l’ensemble d’éléments du harnais, sont commercialisées en majorité durant la période des moussems traditionnels annuels, ou se mêlent le folklorique et le religieux. Les festivals de la Fantasia qui accompagnent ces moussems, sont souvent l’occasion pour les fanatiques des chevaux parmi les agriculteurs de renouveler leurs selles.
Le moussem - de “mawsim”, “événements périodiques” - est né durant la période pré-islamique. Il s’agissait alors d’un marché installé au croisement des itinéraires empruntés par les caravanes, de préférence proche d'un lieu saint pour bénéficier de sa protection. Commerce et échanges entre les tribus étaient accompagnés de nombreuses festivités.
Parmi ces rendez-vous annuels que connaît le Royaume :
Le moussem de Moulay Abdellah AMGHAR à El Jadida, considéré comme étant le plus grand festival du cheval au Maroc, est devenu une opportunité pour revaloriser et promouvoir cet artisanat séculaire.
La sellerie artisanale peut être considérée comme étant l'une des activités artisanales les plus séculaires, du fait qu'elle se rapporte à l'art équestre et au cheval, conçu comme étant la plus noble conquête de l'homme.
Le cheval qui incarne à la fois les valeurs de la beauté et de la noblesse, a dans toutes les civilisations, toujours été intimement lié à l'homme.
La civilisation arabo-musulmane lui a accordé une place toute particulière.
En effet, la littérature arabe regorge d'ouvrages consacrés à la fabrication des selles. A en citer la «selle» d'Abou Obaïda, la «description de la selle et la bride» d'Ibn Duraïd Al Azadi qui décrit la selle comme «le nom qui combine le bois, les vêtements et les lacets».
Au Maroc, le cheval étant, jadis, un moyen de transport très répandu et un signe de reconnaissance sociale, les grands propriétaires terriens et les notables, tant ruraux que citadins, se rivalisaient pour acquérir les meilleures selles.
Nombreuses sont les villes connues par une tradition de fabrication de selles traditionnelles. A ce titre il y a lieu de citer les villes de Fès, Marrakech et Taza, ainsi que d'autres villes qui ont vu naître, au début du siècle précédent, des ateliers de sellerie, telles que Rabat, Casablanca, Meknès, El Jadida, Khénifra et Essaouira. Toutefois, c'est à Fès et Marrakech que se concentraient les excellents maîtres selliers, musulmans et juifs marocains. Ces derniers ont excellé des siècles durant dans la fabrication de selles artisanales dorées et brodées de motifs marocains ancestraux.
Une forte corporation d'artisans selliers s'est alors développée, notamment à Fès et Marrakech, où d'illustres maîtres selliers ont fait la grandeur de cet art ancestral et des quartiers ont été entièrement dédiés à cette activité, tels que le quartier « Sekkatine » à Fès et le quartier « Serrajine » à Marrakech.
Si l'art de la sellerie artisanale a perduré durant toutes ces années, c'est en grande partie grâce à la sollicitude des dynasties qui ont régné sur le Maroc, et qui ont su perpétuer le prestige du cheval et la noblesse des arts équestres. Les traditions à la fois religieuses et populaires ont également contribué à promouvoir ce savoir faire ancestral.
Cependant, force est de constater que les grands maîtres selliers disparaissent les uns après les autres. Ils se comptent désormais sur les doigts de la main et il est devenu urgent de sauvegarder ce savoir-faire et cet art multiséculaires qui risque de disparaître à tout jamais.