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Remontant à l’antiquité le tannage végétal, a pendant des siècles été la façon la plus répandue de traiter le cuir. Aujourd’hui de plus en plus rare ce procédé qui demande du temps, contrairement au tannage minéral, reste cependant de loin le plus savant, le plus authentique et aussi le plus écologique.
Au Maroc, seuls quelques tanneurs exerçant dans des unités artisanales, utilisent encore des tannins végétaux comme les feuilles de chêne, d’acacia, de mimosa, ou les graines de tamaris. Ils transmettent de génération en génération les secrets de ces techniques ancestrales associant le tannage en sac et le tannage dans les fosses, qui sont les véritables méthodes traditionnelles de fabrication des fameux cuirs de luxe, désignés sous le nom de maroquins.
L’usage du cuir remonte probablement aux origines de l’humanité. Les découvertes archéologiques d'outils ayant servi au travail des peaux et de restes osseux d'animaux portant des traces de dépeçage corroborent l’idée que les premiers hommes ont eu recours aux peaux de bêtes pour se vêtir, se chausser et construire leur habitat. Pour rendre les peaux imputrescibles, on les exposait à l'action de la fumée. Le hasard, doublé d’un rapprochement de cause à effet, a probablement permis à l'homme, de découvrir le tannage végétal à l'aide d'écorces, de bois ou de feuilles.
Durant près de 4000 ans, sur une période qui s’étend de l’antiquité (3000 avant JC) au moyen-âge (+1200 après JC), cette technique de traitement les peaux va se répandre et se développer, tant en Europe qu’en Egypte et en Chine. Avec les premières agglomérations urbaines, des communautés d’artisans tanneurs s’installent à proximité de ces centres qui pouvaient servir de marchés d'écoulement et de lieu d'approvisionnement. Les établissements s'implantent au bord des rivières, en raison des grandes quantités d'eau nécessaires à la préparation des peaux pour le tannage.
Égyptiens, Babyloniens, Grecs, Assyriens, Hébreux et Romains se transmettent et améliorent les techniques de fabrication du cuir, les outils et ustensiles en cuir trouvés dans des sépultures de l'époque en témoignent.
Au Maroc, le travail des peaux, remonte aux premiers royaumes de Maurétanie(1) , mais il va véritablement se développer d’abord dans les cités du Tafilalet(2) sous l’Émirat de Sijilmassa, puis à Marrakech avant de connaître son apogée dans la ville de Fès où au 12ème siècle, sous la dynastie Almohade, les artisans marocains vont porter à une telle perfection l’art du cuir, qu’il vont donner naissance au terme "Maroquinerie" qui trouve son étymologie directe dans le nom de son pays d’origine. La technique du cuir fut transmise à l'Europe à travers l'Andalousie et ses fameux cuirs cordouans, d'où dérive le mot cordonnier.
Aujourd’hui, le tannage végétal, qui pendant des siècles a été la façon la plus répandue de traiter le cuir au Maroc, se perpétue dans les dernières tanneries traditionnelles. Bien que de plus en plus rare, il reste de loin le procédé le plus savant, le plus authentique et aussi le plus écologique.
Les tanneries traditionnelles sont organisées autour de grandes cuves où passent les peaux pour leurs différents traitements : Verdissage, écharnage confitage, tannage etc.…
Chaque région a ses recettes de tannage qui varient selon la disponibilité des produits tannants, mais aussi selon des savoirs locaux anciens en rapport avec l’écologie locale (végétaux, minéraux d’extraction régionale). La tannerie de Taroudant a été rénovée il y a quelques années, et les cuves en ciment ont été financées par la ville française de Romans-sur-Isère (Drôme), ville jumelée avec Taroudant et qui est aussi historiquement spécialisée dans la confection de chaussures.
Organisé en corporation, le travail y est exclusivement réservé aux hommes. La société des artisans est non seulement hiérarchisée selon le niveau de spécialisation des ouvriers et de leur savoir-faire, mais elle est aussi structurée autour d’un code de valeurs morales, une organisation spatiale et technique des différentes opérations traitant les peaux. Cette organisation permet une production abondante et variée.
Les corporations d’artisans sont souvent à l’origine de formes artistiques telles que des courants musicaux ou poétiques. On peut ainsi citer la « dakka roudania », qui est une musique dont l’origine se trouve dans le cérémonial de la préparation des tannins qui donne lieu à un danse rituelle où les tanneurs, toujours au nombre de 3, s'appuient sur un rythme précis provenant de la percussion alternée de leur pilon.